vendredi 6 juillet 2007

Abbé Dinouart, L' Art de se taire


Le premier degré de la sagesse est de savoir se taire ; le second de savoir parler peu, et de se modérer dans le discours ; le troisième est de savoir beaucoup parler, sans parler mal et sans trop parler.



Canova, Le Baiser

CHAPITRE PREMIER

Principes nécessaires pour se taire





I. On ne doit cesser de se taire, que quand on a quelque chose à dire qui vaut mieux que le silence.
II. Il y a un temps pour se taire, comme il y a un temps pour parler.
III. Le temps de se taire doit être le premier dans l'ordre ; et on ne sait jamais bien parler, qu'on ait appris auparavant à se taire.
IV. Il n'y a pas moins de faiblesse, ou d'imprudence à se taire, quand on est obligé de parler , qu'il y a de légèreté et d'indiscrétion à parler, quand on doit se taire.
V. Il est certain qu'à prendre les choses en général, on risque moins à se taire qu'à parler.
VI. Jamais l'homme ne se possède plus que dans le silence : hors de là, il semblese répandre, pour ainsi dire, hors de lui-même, et se dissiper par le discours, de sorte qu'il est moins à soi qu'aux autres.
X. Le silence tient quelquefois lieu de sagesse à un homme borné, et de capacité à un ignorant.




D'après Le Baiser de Canova


CHAPITRE II

Différentes espèces de silence


Il est un silence prudent, et un silence artificieux. Un silence complaisant, et un silence moqueur. Un silence spirituel, et un silence stupide. Un silence d'approbation, et un silence de mépris. Un silence de politique. Un silence d'humeur et de caprice.

V. C'est un silence spirituel, quand on aperçoit sur le visage d'une personne qui ne dit rien, un certain air ouvert, agréable, animé, et propre à faire comprendre, sans secours de la parole, les sentiments qu'on veut laisser connaître.
VI. C'est au contraire un silence stupide, lorsque la langue étant immobile, l'esprit insensible, tout l'homme paraît être abîmé dans une profonde taciturnité qui ne signifie rien.

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