samedi 2 juin 2007

Boris Vian, Le Deserteur, extraits

Si c'était à refaire, recommenceriez - vous ? dit la chanson ; jamais on ne recommencerait, à moins d'être gâteux ou d'ignorer le goût de l'expérience.

Il subsiste encore sur 'notre terre' des individus dont la préoccupation majeure et les intérêts les plus affirmés sont de manger bien, de boire froid, de se divertir et de se reproduire.

Le génie est une longue patience, c'est une réflexion de génie pas doué.

La critique, art aisé, se doit d'être constructive.


Notre père qui êtes aux cieux, restez y ... et nous nous resterons sur la Terre qui est quelques fois ... si jolie. [...]

in Quand j'aurais du vent dans mon crâne, Boris Vian





Klimt Gustave, Frise Beethoven


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LE DÉSERTEUR



Monsieur le Président, Je vous fais une lettre, Que vous lirez peut-être, Si vous avez le temps. Je viens de recevoir, Mes papiers militaires, Pour partir à la guerre, Avant mercredi soir. Monsieur le Président, Je ne veux pas la faire, Je ne suis pas sur terre, Pour tuer des pauvres gens. C'est pas pour vous fâcher, Il faut que je vous dise, Ma décision est prise : Je m'en vais déserter. Depuis que je suis né, J'ai vu mourir mon père, J'ai vu partir mes frères, Et pleurer mes enfants. Ma mère a tant souffert, Qu 'elle est dedans sa tombe, Et se moque des bombes, Et se moque des vers. Quand j'étais prisonnier, On m'a volé ma femme, On m'a volé mon âme, Et tout mon cher passé. Demain de bon matin, Je fermerai ma porte, Au nez des années mortes, J'irai sur les chemins, Je mendierai ma vie, Sur les routes de France, De Bretagne en Provence, Et je dirai aux gens : Refusez d'obéir, Refusez de la faire, N'allez pas à la guerre! Refusez de partir! S'il faut donner son sang, Allez donner le vôtre. Vous êtes bon apôtre, Monsieur le Président. Si vous me poursuivez, Prévenez vos gendarmes, Que je n'aurai pas d'armes, Et qu'ils pourront tirer.


Boris Vian, Le Déserteur









Klimt Gustav, Le Baiser

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